Pour une dixième fois ce soir, nous nous rassemblons à Tiohtià:ke/Montréal en plein cœur de l’hiver pour célébrer la richesse de nos arts traditionnels. Nous sommes de plus en plus nombreux et nous sommes de plus en plus convaincus de l’importance de cette fête. 

C’est dans un contexte de printemps érable que la première édition des Manteaux su’ l’lit pis les bottes dans l’bain a été réfléchie et conçue. En fait, les débuts de La R’voyure étaient en soi pour chacun d’entre nous, un bourgeonnement, un point vernal, une petite révolution artistique, et même personnelle.

Maladroitement, au fil de nos questionnements, notre vision des arts traditionnels a évolué. On a pris confiance, on a pris conscience. On a ramené notre regard vers le présent. 

Ramener son regard vers le présent représente un défi dans un contexte dans lequel le présent est si instable, le futur si apeurant qu’il pourrait nous prendre envie, à tort, de nous réfugier dans le passé. Entre l’élection de Trump, la montée des mouvements extrémistes, les événements climatiques extrêmes, le recul des droits fondamentaux des femmes et des personnes LGBTQIA2+, la culture a de la difficulté à trouver sa place à un moment où, au contraire, son importance est majeure. 

Et je ne parle pas de cette culture que l’on consomme, mais plutôt de cette culture que l’on partage, de cette culture qui rassemble, de cette culture qui unit. 

Nous sommes le 22 février. Le printemps arrive dans 1 mois – plus précisément dans 26 jours, le 20 mars prochain. C’est bientôt le printemps alors que nous avons un peu l’impression d’être à l’aube d’un hiver long, froid et rigoureux. 

On est plusieurs à se demander ce qu’on peut faire dans un tel contexte. Quel est notre champ d’action? 

Et bien, c’est un peu naïvement que l’on pense que de se raccrocher à cette culture de rassemblement, à ce partage humain de musiques, de chansons et de danses, à cette création de référents communs et collectifs, nous permettra de garder l’espoir d’un équinoxe. Les printemps reviennent toujours. À ce conservatisme ambiant qui tente de nous diviser au nom d’une tradition, répliquons par notre vision de la tradition – ouverte à l’autre et tournée vers l’avenir. 

En attendant le prochain printemps, laissons-nous sur ces paroles de Joséphine Bacon:

J’ignore si demain me gardera intacte

Je dis que l’espoir de se laisser être

Éloigne le désespoir

Alors, comme le faisait si bien Alain, dansons, dansons.